Femme enceinte exposée aux radiations ionisantes au travail : qui est responsable de la protection de la mère et du foetus ?

Plus de 330 000 travailleurs peuvent être exposés à des sources de rayonnements ionisants sur leur lieu de travail, 45% sont des femmes. Nous sommes plusieurs acteurs, internes ou externes à l’entreprise, à être concernés par la surveillance et l’aptitude au poste de travail des femmes exposées aux radiations ionisantes sur leur lieu de travail : médecin du travail, médecin traitant, gynécologue, employeur et personne compétente en radioprotection partagent la responsabilité de la protection de la mère et du foetus.

Bilan des expositions professionnelles en 2010
Une femme enceinte ne peut pas être exposée à des travaux qui imposent un classement en catégorie A
Informations complémentaires sur le site de l’IRSN
Les acteurs  impliqués dans la protection d’une salariée enceinte exposée aux rayonnements ionisants ?

Parmi les salariées exposées, certaines ne rencontrent pas de médecin du travail parce qu’elles ne sont pas salariées, ou effectuent des recherches universitaires, ou sont étudiantes et travaillent quelques mois dans un bloc opératoire…Tous les médecins amenés à prendre en charge des femmes enceintes doivent relayer les informations.

Bilan des expositions professionnelles en 2010

Depuis 2005, l’IRSN a mis en place SISERI, système d’information de la surveillance des expositions aux rayonnements ionisants ce qui lui permet de suivre ainsi en France, les travailleurs exposés aux rayonnements ionisants.
Parmi les travailleurs exposés aux rayonnement ionisants et surveillés, selon le rapport de l’IRSN « Radioprotection des travailleurs. Exposition professionnelle aux rayonnements ionisants en France », Bilan 2010 :

  • 95,8 % reçoivent une dose inférieure à la limite réglementaire pour le public, soit 1mSv/an,
  • 4/5 d’entre eux reçoivent une dose inférieure au seuil de détection des dosimètres,
  • 3,7% une dose annuelle comprise entre 1 et 6 mSv,
  • 0,5% une dose annuelle comprise entre 6 et 20 mSv

Une femme enceinte ne peut pas être exposée à des travaux qui imposent un classement en catégorie A

Les articles D 4152-5 et R4451-45 du code du travail rappellent les règles qui doivent être respectées, notamment une femme enceinte ne peut pas être exposée à des travaux qui imposent un classement en catégorie A
Exposition aux rayonnements ionisants, classement en catégorie A ou B

Selon le niveau d’exposition, on classe les salariés dans l’une ou l’autre des catégories.

  • Catégorie A
    • Travailleur exposé susceptible de recevoir une dose comprise entre 6 et 20 mSv par an.
  • Catégorie B
    • Travailleur exposé susceptible de recevoir une dose comprise entre 1 et 6 mSv par an.

Rappel des articles du code du travail

Article D. 4152-5 du Code du travail :

« Lorsque, dans son emploi, la femme enceinte est exposée à des rayonnements ionisants, l’exposition de l’enfant à naître est, pendant le temps qui s’écoule entre la déclaration de grossesse et l’accouchement, aussi faible que raisonnablement possible, et en tout état de cause inférieur à 1 mSv. « 

Article R.4451-45 du Code du travail

« Les femmes enceintes et les jeunes travailleurs mentionnés aux articles D. 4152-5 et D. 4153-34 ne peuvent être affectés à des travaux qui requièrent un classement en catégorie A.« 

Informations complémentaires sur le site de l’IRSN

Dans la rubrique FAQ, l’IRSN répond à de nombreuses questions relative à l’exposition aux radiations ionisantes des femmes enceintes.

Une femme enceinte travaillant dans un service mettant en œuvre des rayonnements ionisants peut-elle continuer à exercer son activité professionnelle ?

« Les contraintes sur la dose au fœtus ne signifient pas que la travailleuse enceinte ne doit plus du tout travailler avec des appareils émetteurs de rayonnements ionisants, ou encore qu’elle ne doit plus entrer ou travailler dans des zones réglementées. Cela implique que l’employeur, en pratique la PCR et le MT, doit évaluer attentivement les conditions d’exposition des femmes enceintes, et plus particulièrement, les risques liés à des expositions accidentelles à des fortes doivent être nuls.  »

 » Quand la grossesse d’une travailleuse est connue, 3 options sont communément appliquées en milieu médical :

  • 1) pas de modifications des attributions ;
  • 2) modification du poste vers un lieu où le niveau d’exposition est plus faible ;
  • 3) affectation à un emploi où le risque d’exposition est nul. Il n’y a pas de réponse unique à toutes les situations.

 L’affectation à un poste non exposé est parfois une demande de la travailleuse qui n’accepte pas le surcroit de risque, si minime soit-il.
L’employeur a intérêt à accéder à cette demande, afin de prévenir les difficultés rencontrées dans le cas de la survenue de malformations congénitales spontanées (3% des naissances). Cette approche n’est pas une recommandation de base, puisqu’à l’évidence la taille et la flexibilité du service vont être prépondérants pour combler le poste vacant.

Modifier l’affectation vers un poste où le niveau d’exposition est plus faible est aussi une possibilité.
En radiodiagnostic, il s’agira d’affecter la manipulatrice de radiologie interventionnelle vers le scanner ou toute autre activité où le personnel est moins soumis au rayonnement diffusé. En médecine nucléaire, le temps de présence dans la radiopharmacie ou la manipulation d’iodures seront restreints. En radiothérapie (sources scellées), les manipulatrices ou infirmières ne participeront pas à la curiethérapie manuelle.
Une considération éthique est à prendre en compte dans ces deux derniers cas puisqu’un autre travailleur subira une augmentation de la dose reçue du fait de la grossesse de sa collègue.

Fréquemment, la travailleuse enceinte souhaite continuer son activité normalement, car l’activité du service et la qualité de la prise en charge du patient dépendent de cette personne. Du point de vue de la radioprotection ceci est acceptable dès lors que la dose au fœtus a été raisonnablement et précisément estimée, et qu’elle reste inférieure à 1 mSv entre la date de déclaration de la grossesse et la naissance. Une étude de poste doit permettre de s’assurer qu’un accident à un fort niveau d’exposition est improbable. »

Peut-on maintenir à son poste une travailleuse de médecine nucléaire susceptible d’être exposée aux rayonnements ionisants durant la grossesse ?

« Dans la plupart des procédures diagnostiques, il n’est pas nécessaire pour les travailleuses enceintes de prendre des précautions supplémentaires autres que la limitation du temps passé auprès des patients. L’exposition auprès des patients  à qui l’on a administré des radiopharmaceutiques est assez faible, il n’y a donc aucune justification radiologique à la retirer des procédures d’imagerie. « 

Les acteurs  impliqués dans la protection d’une salariée enceinte exposée aux rayonnements ionisants ?

La femme enceinte

La salariée elle même doit informer le plus tôt possible de sa grossesse puisque c’est dans les premières semaines de grossesse que les risques sont les plus élevés :
pour des niveaux d’exposition élevée pour le foetus ( 100 mSv) :
risque de malformation d’organes jusqu’à la 8ème semaine de grossesse,
risque de retard mental entre la 8ème et la 15ème semaine de grossesse.
L’exposition in utero aux rayonnements ionisants peut augmenter les risques de cancer chez l’enfant, au cours de sa vie.
La femme enceinte doit donc déclarer sa grossesse au médecin dès lors qu’elle est confirmée.
L’enfant à naître doit recevoir moins de 1mSv de dose efficace entre la déclaration de grossesse et l’accouchement.

Le médecin du travail

Le médecin du travail informe et conseille à la fois la salariée et l’employeur, statue sur son aptitude au poste de travail, peut demander un aménagement de poste.
Les femmes en âge de procréer exposées aux rayonnements ionisants doivent être incitées à parler très tôt de leur projet de grossesse au médecin du travail. Une femme enceinte ne doit pas atteindre la visite médicale périodique pour en parler au médecin du travail, elle peut demander à rencontrer le médecin du travail à tout moment.
A partir du 1 juillet 2012,  les salariés exposés aux rayonnements ionisants et classés en catégorie A conserveront bien une surveillance périodique tous les ans ( surveillance médicale renforcée) , à laquelle il ne sera pas possible de déroger.

Le médecin traitant et le gynécologue

Ces médecins peuvent prescrire si besoin un arrêt de travail à la femme enceinte.
Il faut rappeler que lorsqu’une femme enceinte est exposée à des agents toxiques pour la reproduction de catégorie 1 ou 2, ce qui est le cas pour une femme enceinte  exposée aux rayonnements ionisants, si la femme ne peut pas être reclassée sur un autre poste de travail qui n’expose pas aux rayonnements ionisants, elle peut être en arrêt de travail, elle perçoit alors l’intégralité de son salaire
Une allocation journalière est versée par la Sécurité Sociale.
Le complément de salaire est versé par l’employeur : ordonnance N° 2001-173 du 22 février 2001.

La personne compétente en radioprotection

La PCR, Personne compétente en radioprotection est désignée par le chef d’établissement, dans certains cas, elle peut être extérieure à l’entreprise. Elle évalue les risques des postes de travail sous la responsabilité de l’employeur, elle donne son avis pour délimiter les  zones « contrôlée» et «surveillée»,  centralise les résultats des dosimétries opérationnelles, définit les mesures de protection en fonction des résultats des dosimétries passives et opérationnelles, informe le médecin du travail, l’employeur, etc

L’employeur

Il est responsable de la santé et de la sécurité de ses salariés, il doit faire évaluer les risques à chaque poste de travail.

On assiste à une féminisation des emplois dans des secteurs exposés aux rayonnements ionisants comme le domaine médical. Les femmes en âge de procréer doivent être sensibilisés aux risques liés à l’exposition aux rayonnements ionisants par les médecins du travail bien sûr mais également tout autre professionnel de santé amené à les prendre en charge puisque suivant leur condition d’exercice, certaines ne bénéficient pas nécessairement d’un suivi en santé au travail.

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