L’expertise Sécurité sociale pour les pathologies du rachis lombaire : avis d’un médecin expert

Lumbago et pathologies du rachis lombaire : lorsqu’il existe un litige relatif à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, c’est à dire lorsque l’assuré n’est pas d’accord avec la décision de la caisse de Sécurité sociale, il demande une expertise médicale, comme le prévoit l’article L 141-1 du code de Sécurité sociale. Pour les pathologies du rachis lombaire, l’expert est surtout sollicité pour des pathologies du rachis reconnues en accident du travail, il est par contre peu sollicité pour les maladies déclarées au titre des maladies professionnelles sur le tableau n° 98. L’expert n’est pas sollicité pour les contestations relatives à l’IPP, Incapacité permanente partielle,  puisque c’est le TCI, Tribunal du contentieux de l’incapacité, qui statue si l’assuré n’est pas d’accord avec le taux, puis éventuellement ensuite la CNITAAT, Cour nationale de l’incapacité et de la tarification de l’assurance des accidents du travail.

Pathologie lombaire reconnue en AT, Accident du travail
Différentes questions se posent devant un lumbago qui survient durant le travail
Glissement de l’accident du travail vers la maladie professionnelle

Pathologie lombaire reconnue en AT, Accident du travail

La pathologie du rachis reconnue en accident du travail se résume le plus souvent aux lumbagos et aux sciatiques.
Pour mémoire, un disque intervertébral comporte le nucléus pulposus élément central amortisseur et l’annulus fibrosus qui constitue l’enveloppe.

Qu’est ce qu’un lumbago ?

Un lumbago est la traduction clinique d’une déchirure de l’annulus du disque vertébral : l’annulus se déchire parce que le disque est malade.
Au début de la maladie, les cellules du nucléus, les protéoglycanes ne fonctionnent pas bien,  elles ne réhydratent pas le disque de manière satisfaisante en particulier pendant les périodes de repos. Cette deshydratation entraîne plusieurs conséquences :

  • le disque perd du volume, il s’affaisse, sa hauteur diminue,
  • et comme le ferait un pneu de bicyclette qui se dégonfle, le disque se boursoufle et déborde latéralement,
  • l’annulus se dessèche également et devient cassant,
  • à l’occasion  d’un mouvement complexe ( pas nécessairement lors du port d’une charge) par exemple une flexion en avant, une rotation, l’annulus desséché se déchire, c’est le lumbago:
    • soit c’est une déchirure partielle, la cicatrisation fibreuse va intervenir si le patient se met au repos,
    • soit, si ce n’est pas la première déchirure, il peut y avoir une ouverture de l’annulus, et donc survenue d’une hernie discale.
      La hernie correspond à l’issue de l’annulus hors du canal, qui va donc irriter les éléments nerveux, c’est la sciatique.
      Au cours de la sciatique, en plus de la compression mécanique, il y a un phénomène chimique puisque l’annulus sécrète des neuro-toxines agressives vis à vis des éléments nerveux. La plupart des hernies discales ont un traitement médical.

D’où vient la lombalgie ?

La lombalgie reconnaît plusieurs causes.

  • Une origine discale : la souffrance du disque entraîne la production par celui-ci de toxines responsables de douleurs ;
  • D’autre part la perte de hauteur discale entraîne une distension de l’annulus périphérique du disque et celui-ci est responsable (comme dans l’image du pneu de bicyclette dégonflé) d’une instabilité discale ou de micromouvements multidirectionnels ; ces micromouvements entraînent des tensions sur les ligaments entourant la colonne vertébrale responsable de phénomènes douloureux.
  • La perte de hauteur discale provoque un conflit au niveau des articulaires postérieures qui sont mises en compression ; elles travaillent de façon non satisfaisante et deviennent douloureuses.

Différentes questions se posent devant un lumbago qui survient durant le travail

Un lumbago sans sciatique se résout par une cicatrisation fibreuse de l’annulus

Dans ce cas, l’état se stabilise, l’état est donc consolidé au sens médicolégal du terme.
On ne sait pas si la cicatrisation fibreuse majore la lombalgie…
On ne sait pas au bout de combien de temps le disque cicatrise, cela dépend sans doute de l’importance de la lésion et nous n’avons aucun moyen de la mesurer.

L’importance douloureuse est en fonction de chacun et n’est pas un élément de mesure fiable.
L’imagerie peut montrer la déchirure mais pas la cicatrisation.
La répétition des lumbagos au fil du temps  n’augmente pas le risque de voir apparaître une hernie discale.

Quelles sont les séquelles possibles du lumbago ?

Certains experts considèrent que la lombalgie est suivie d’un retour à l’état antérieur donc l’Incapacité physique (IP) est nulle, tandis que d’autres experts prétendent que la cicatrisation fibreuse peut aggraver la lombalgie et augmenter l’Incapacité Physique (IP).

Si celle-ci est prise en compte, il ne peut s’agir non pas de la douleur qui n’est pas indemnisée en accident du travail mais des conséquences de la gêne fonctionnelle dont elle résulte.

Si le lumbago se reproduit au travail, il s’agira d’un accident du travail

Alors que si ce lumbago se produit en dehors du travail, il s’agira d’une pathologie prise au titre de la maladie.

  Glissement de l’accident du travail vers la maladie professionnelle

Un assuré peut présenter un accident du travail avec atteinte du rachis dans un premier temps, qui est ensuite consolidé, puis le médecin traitant peut parfois effectuer une déclaration de maladie professionnelle sur le tableau n° 98.
Déclarer une rechute de l’accident du travail,  c’est déclarer un nouvel épisode qu’il faudra bien consolider et seul un nouvel accident survenu au cours du travail pourra faire réapparaître une nouvelle rechute alors qu’en maladie professionnelle, une fois celle-ci reconnue, si elle s’aggrave c’est à dire si la lombalgie s’aggrave par exemple, la rechute de la maladie professionnelle pourra être déclarée sans nouvel « accident ».

Cet article a été réalisé conjointement par

Dr Marie-Thérèse Giorgio,
responsable de la rédaction du site www.atousante.com

Dr Pierre Heissler :

  • Chirurgien Orthopédiste, membre du Collège d’Orthopédie et de la Société Française de Chirurgie Rachidienne,
  •  Expert près la Cour d’Appel (en orthopédie et en contentieux de la Sécurité Sociale),
  •   Expert près la Commission Nationale des Accidents Médicaux,
  •   Expert près la Cour Nationale d’Indemnisation de l’Incapacité et des Accidents du Travail.

Tableaux des maladies professionnelles associés :

  Tableau n°97 RG : Affections chroniques du rachis lombaire provoquées par des vibrations de basses et moyennes fréquences transmises au corps entier (7,1 KiB, 119 464 hits)

  Tableau n°98 RG : Affections chroniques du rachis lombaire provoquées par la manutention manuelle de charges lourdes (7,3 KiB, 247 429 hits)

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