Harcèlement sexuel : jurisprudences
Le harcèlement sexuel est actuellement dénoncé sur les réseaux sociaux. Atousante propose une revue de la jurisprudence sur ce sujet. Le Code pénal ( article 222-33) et le Code du travail ( article L 1153-1) définissent le harcèlement sexuel comme le fait d’imposer à une personne de façon répétée des propos ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante. Aucun employé ne doit subir des faits de harcèlement sexuels ou assimilés au harcèlement sexuel. Le harcèlement sexuel fait l’objet d’une jurisprudence importante.
Comportement qualifié de harcèlement sexuel
Faits qui relèvent à la fois de harcèlement sexuel et de harcèlement moral
Le harcèlement sexuel peut conduire à l’ inaptitude de la victime
Adresser des documents pornographiques peut être qualifié de harcèlement sexuel
Harcèlement moral et sexuel et absence de réaction de la hiérarchie
Harcèlement sexuel en dehors de l’entreprise
Comportement qualifié de harcèlement sexuel
L’arrêt de la Cour de cassation du 24 septembre 2008, n° 06-46517 décrit le comportement d’un directeur financier dans une association, ce comportement est assimilé à du harcèlement sexuel :
…M. X…, cadre, avait eu un comportement, dénoncé par sa subordonnée mineure, consistant à tenter de l’embrasser contre son gré sur le lieu du travail, à l’emmener à son domicile en renouvelant à cette occasion des avances de nature sexuelle, et à l’appeler fréquemment par téléphone en dénigrant la relation affectueuse que celle-ci entretenait avec un tiers, provoquant par ces agissements angoisse et même dépression ; qu’en l’état de l’ensemble de ces motifs, elle a caractérisé un harcèlement sexuel constitutif d’une faute grave qu’elle a estimé être la cause du licenciement…
Faits qui relèvent à la fois de harcèlement sexuel et de harcèlement moral
Une salariée a été victime de la part du chef d’entreprise d’avances sexuelles, de brimades et d’hostilité, de propos et gestes déplacés, les faits relevaient à la fois de harcèlement sexuel et de harcèlement moral.
Arrêt de la Cour de cassation, n° 07-42920 du 23 septembre 2008
…1°/ que le harcèlement moral suppose des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel et que le harcèlement sexuel suppose des agissements dont le but est d’obtenir des faveurs de nature sexuelle à son profit ou au profit d’un tiers ; qu’en se bornant à affirmer que les attestations produites par la salariée, laquelle faisait état d' »avances sexuelles », de « brimades », d' »hostilités », de propos et gestes déplacés » et de « petits mots » de la part de M. Y…, relataient clairement « des faits précis », témoignaient de la « réputation d’homme à femmes » de M. Y… et de son « comportement hostile et harceleur » envers Mme X…
Le harcèlement sexuel peut conduire à l’ inaptitude de la victime
Arrêt de la Cour de cassation n° 07-44082 du 3 mars 2009
Le comportement d’un biologiste à l’égard d’une de ses employées a conduit à l’inaptitude de la victime du harcèlement sexuel.
…Monsieur Y… qui était en instance de divorce, sans doute très affecté par cette procédure, supportant difficilement d’être régulièrement séparé de l’affection de ses filles, a tenté par tous les moyens, à compter du début de l’année 2004, de séduire Madame X… qui élevait seule ses trois enfants, pour la convaincre de venir vivre avec lui et fonder un nouveau foyer ; que cette entreprise de séduction, tout à fait incompatible avec le devoir de réserve que doit observer et s’imposer un employeur à l’égard de ses salariées, s’est manifestée par des faits concrets : achats de cadeaux, bijoux, vêtements de prix, chaussures ; installation à son domicile de matériel informatique ; mise à sa disposition d’un véhicule neuf ; proposition de partager la même chambre d’hôtel lors de journées de formation …;…
le comportement de Monsieur Y… à l’égard de Madame X… dépassait largement l’attitude de compassion qu’un employeur peut avoir envers une salariée qui rencontre des difficultés dans sa vie familiale, mais constitue un véritable harcèlement dont le but était de convaincre et même de contraindre la salariée à céder à ses avances ; que d’ailleurs, nul doute que si Madame X… n’avait pas refusé, son employeur lui aurait proposé au sein de l’entreprise un poste de choix et des horaires de travail compatibles avec ses obligations familiales ; que Madame X…, justifiant par la production de certificats médicaux de son médecin traitant (le docteur en médecine C…) et de la médecine du Travail (docteur en médecine D… qui a examiné la patiente en juin, octobre 2004, et février et mars 2005) que son état de santé, un syndrome dépressif majeur qui a justifié une prise en charge par un médecin psychiatre, résulte du comportement fautif de son employeur » …
Adresser des documents pornographiques peut être qualifié de harcèlement sexuel
Arrêt n° 08-70382 du 12 mai 2010 : le supérieur hiérarchique adresse des documents à caractère pornographique à son employée, ces faits sont qualifiés de harcèlement sexuel.
…que l’expert graphologue avait retenu que certains courriers et montages à caractère pornographique qui avaient été envoyés à Mme X… portaient bien l’écriture de M. Y… et que l’appelante fournissait un certain nombre d’attestations et de témoignages qui venaient conforter, ne serait-ce qu’indirectement, ses accusations de harcèlement à l’encontre de son supérieur hiérarchique
Harcèlement moral et sexuel et absence de réaction de la hiérarchie
Arrêt n°10-21948 du 15 février 2012 de la Cour de cassation
Un artiste interprète cascadeur au sein de la société Euro Disney, a été licencié le 5 décembre 2006 pour faute ; il a contesté son licenciement et a soutenu avoir été victime d’un harcèlement moral et sexuel. En effet, des photos de cette personne torse nu circulaient dans l’entreprise et portaient des annotations blessantes, homophobes, les auteurs n’étaient pas identifiés. La responsable hiérarchique avait même participé à ces faits et n’avait pas procéder aux retraits de ces photos, ni cherché à savoir quels étaient les auteurs..
Harcèlement sexuel en dehors de l’entreprise
Le harcèlement sexuel peut être caractérisé et donc sanctionné par l’employeur , même s’il se déroule en dehors de l’entreprise, par exemple des rendez-vous organisés dans une chambre d’hôtel même en dehors des heures de travail. Le fait pour un employé d’abuser de son pouvoir hiérarchique dans le but d’obtenir des faveurs sexuelles de collègues de travail constitue un harcèlement sexuel même si les agissements ont lieu en dehors des temps de travail.
Organisation d’un rendez-vous en dehors des heures de travail dans l’arrêt n° 10-12930 du 11 janvier 2012
M. X… le 2 décembre 2005, il est reproché à celui-ci d’avoir organisé le 29 septembre 2005 un rendez-vous avec une collaboratrice de l’agence de Belfort, placée sous ses ordres, pour un motif professionnel, en dehors des heures de travail et de l’avoir à cette occasion entraînée dans une chambre d’hôtel, comportement constitutif d’un abus de pouvoir et d’autorité, de nature à jeter le discrédit sur l’entreprise et à causer un trouble grave au sein de celle-ci ; les faits ont été portés à la connaissance de l’employeur par une lettre de la salariée en cause, Mme F…, en date du 11 octobre 2005, communiquée aux débats, aux termes de laquelle celle-ci expose en substance que M. X… lui a proposé une invitation à déjeuner le jeudi 29 septembre 2005 souhaitant l’entretenir de sa promotion professionnelle, déjà évoquée lors d’une entretien du 21 septembre précédent, et après lui avoir fixé rendez-vous à 12 H 10 à l’extérieur de l’entreprise sur un parking, l’a invitée à monter dans son véhicule et, s’étant rendu à l’hôtel-restaurant « Relais Marmottes », a pris une chambre à la réception où il l’a invitée à le suivre, ce qu’elle a fait, à son corps défendant, malgré sa déception, en vue, selon ses dires, de connaître ses véritables intentions ; M. X… aurait alors adopté une attitude et tenu des propos dénués d’équivoque, quant à son désir d’entretenir des relations intimes avec elle, avant de mettre fin à l’entretien et de la reconduire à proximité de l’agence vers 13 H 40 ; convoqué le 12 octobre 2005 à la direction générale pour un entretien, M. X… a confirmé qu’il avait bien eu un entretien avec Mme F… le 29 septembre 2005 dans une chambre d’hôtel ; il n’a pas varié sur ce point, mais a tenté vainement après la rétractation de sa démission de justifier de sa bonne foi et de la pureté de ses intentions dans un courrier du 18 octobre 2005, soutenant que l’entretien avait été organisé non pas à son initiative, mais sur la demande pressante de Mme F … qui aurait souhaité l’entretenir personnellement d’un problème urgent, que celui-ci aurait finalement eu lieu dans une chambre d’hôtel d’un commun accord, en raison de ce que le restaurant choisi était bondé et bruyant et que Mme F… lui aurait alors fait part au cours de celui-ci de son désir d’évolution rapide et de plus grande proximité avec lui ; cette version des faits, qui tend ni plus ni moins qu’à retourner l’accusation de harcèlement sexuel contre la plaignante, qualifiée de personne ambiguë et manipulatrice, outre qu’elle est assez peu crédible, est formellement démentie sur un point, le gérant de l’hôtel-restaurant, sollicité par l’employeur ayant indiqué que le jour des faits, deux repas seulement avaient été servis entre 12H 30 et 13 H 00 ; la version des faits de la salariée est en revanche corroborée par les déclarations recueillies par l’employeur auprès de M. A…, collègue et ami intime de Mme F… et de Mme Z…, supérieure hiérarchique de celui-ci et de Mme F…, laquelle atteste du profond désarroi de celle-ci à l’évocation des faits, révélés à la suite de la mutation de M. A… d
Arrêt du 19 octobre 2011, n° 09-72672 : des faits survenus en dehors du lieu de travail sont qualifiés de harcèlement sexuel
Le manager a tenu des propos à caractère sexuel à deux collègues femmes via des messages MSN, adressés en dehors du temps de travail et à l’occasion de soirées organisées après le travail.
…ALORS QUE les agissements commis par un salarié en dehors du lieu et des heures de travail peuvent être pris en considération par l’employeur dès lors qu’ils causent un trouble objectif à l’entreprise ; qu’il ressort notamment des constatations de l’arrêt qu’à la suite de la plainte d’une salariée, une commission d’enquête composée de la directrice des ressources humaines et d’un délégué du personnel a été mise en place et qu’elle a auditionné 14 salariés, dont certains ont exposé que M. X… marquait ostensiblement son intérêt pour certaines de ses subordonnées en fonction de critères étrangers au travail et ont fait état de rumeurs de favoritisme, le propre adjoint de M. X… l’ayant averti des bruits circulant dans l’entreprise sur son manque de neutralité vis-à-vis de la carrière des salariées placées sous son autorité ; que ces éléments établissaient l’existence d’un trouble causé au sein de l’entreprise par le comportement de l’intéressé…
Quand un harcèlement sexuel est avéré, l’employeur doit sanctionner l’auteur des faits : en matière de harcèlement sexuel la faute grave est toujours caractérisée et il peut donc décider de la sanction la plus lourde c’est à dire le licenciement.
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