Test de détection de l’interféron gamma, (IFN γ) versus IDR chez les personnels de soins

Chez les personnels de soins une IDR, Intradermoréaction, est nécessaire à l’entrée dans la profession mais également pour surveiller les personnes exposées. Les tests IFN γ, test de libération de l’interferon gamma ( en anglais : IGRA, Interferon Gamma Release Assay) , également disponibles, peuvent remplacer les tubertests. Ces 2 tests ne cherchent pas à mettre en évidence le bacille tuberculeux mais une réponse du système immunitaire que l’on a stimulé avec certains antigènes. Depuis 2006 la HAS  estime que les tests IGRA peuvent être utilisés en remplacement de l’IDR et en 2011 le HCSP a publié des recommandations pour l’utilisation de ces tests. Une étude réalisée en 2013 chez des professionnels de  santé de l’Hôpital de Nantes a comparé ces 2 tests : IDR et tests de détection de l’interféron γ.

Diagnostiquer les tuberculoses infectieuses latentes
Comparaison des tests IGRA et  IDR
Quand utiliser l’IDR, quand utiliser un test IGRA ?
Etude rétrospective en 2013 pour comparer IDR et IGRA

Diagnostiquer les tuberculoses infectieuses latentes

La transmission de la tuberculose se fait uniquement par voie respiratoire : seules les tuberculoses respiratoires sont contagieuses (plus particulièrement les patients bacillifères qui toussent).
Alors qu’il y a 8 millions de cas de tuberculose maladie dans le monde, il y aurait 1,5 milliards de cas d’infection tuberculeuse latente. En effet, chez la plupart des patients, l’infection tuberculeuse est initialement contrôlée par l’immunité cellulaire, ce qui aboutit au stade d’infection tuberculeuse latente ( absence de symptômes et de contagion).

Environ 10% des patients qui ont une infection tuberculeuse latente évoluent vers une tuberculose maladie ( ce risque est surtout important dans les 2 années qui suivent le contage).

On cherche à diagnostiquer les tuberculoses infectieuses latentes pour lesquelles il y aurait une indication de traitement : contages récents, patients à risque d’évolution vers l’immunodépression.
On dispose de 2 tests différents : IDR ou tests IGRA, IGRA = Interferon Gamma Release Assay dénommé en français  IFN ,  test de libération de l’interféron Gamma.

Comparaison des tests IGRA ( interferon gamma) et  IDR

Lors d’une tuberculose maladie on met en évidence les bacilles tuberculeux (BK) par la bactériologie ou la biologie moléculaire.

Mais lors des tuberculoses latentes, le nombre de bacilles est faible donc ces examens ne sont pas utilisés : on dispose alors des tests IGRA, qui sont des tests sanguins de détection de l’interféron Gamma ou bien de l’IDR.

Lors de la tuberculose, c’est l‘immunité à médiation cellulaire qui lutte contre l’infection :

le diagnostic d’une infection tuberculeuse latente repose donc sur la mise en évidence d’une réaction immunitaire d’origine cellulaire : soit in vivo par l’IDR à la tuberculine, soit in vitro par les tests IGRA.

IDR et tests IGRA donnent des informations voisines, mais l‘IDR est un test in vivo alors que les tests IGRA  sont des tests in vitro.

Tests de détection de l’interféron gamma : IFN γ

2 tests de détection de l’interferon gamma sont actuellement disponibles sur le marché

Test QuantiFERON : c’est le test qui est réalisé le plus souvent
Test ELIspot TB : utilisable uniquement en laboratoire d’immunologie, donc moins souvent utilisé. Il mesure à partir d’une prise de sang le nombre de cellules qui réagissent après stimulation par des séquences de mycobactéries. L’examen exige une centrifugation et recueille du plasma à un temps précis après le prélèvement.

L’IDR, intradermoréaction, correspond à une injection de tuberculine en intra dermique

L’intradermoréaction à la tuberculine, IDR, est un test cutané qui explore l’hypersensibilité de type retardée induite par l’injection de composants antigéniques de Mycobactérium tuberculosis. La source antigénique utilisée est la tuberculine, injectée en intra dermique, qui entraîne une sécrétion des lymphocytes. On mesure ensuite l’induration, reflet de l’immunité. Deux consultations sont donc nécessaires pour l’IDR.
L‘IDR nécessite une technique parfaite pour être valide, la lecture s’effectue à la 72ème heure, il faut donc revoir les personnes pour la lecture du test.

La réaction est jugée négative lorsque le diamètre d’induration est inférieur à 5 mm.

Les tests IGRA permettent de détecter la sécrétion d’interferon gamma

Les tests IGRA permettent de détecter la sécrétion de cytokines, notamment d’IFN γ qui est produit suite à une stimulation antigènique in vitro de lymphocytes T contenus dans un prélèvement sanguin veineux. Une seule consultation est nécessaire pour un test IGRA, le test est réalisé sur un simple prélèvement veineux.

Avec le test QuantiFERON, on n’injecte pas d’antigène, mais le tube dans lequel on place le prélèvement veineux comporte sur ses parois un équivalent de la tuberculine : un antigène est ainsi mis en contact avec le sang du patient, à 37° pendant 24H, par le laboratoire. Il se produit une libération de cytokines dont l’interféron gamma qui peut être dosé.

Les antigènes utilisés pour l’IDR et le test QuantiFERON sont différents

Avec l’IDR il y a une réaction croisée avec la vaccination BCG car les antigènes utilisés sont également présents dans le BCG et dans les mycobactéries environnementales. 

L’IDR se positive après une vaccination par le BCG.

Par contre les  antigènes utilisés pour le test QuantiFERON ne sont pas présents dans le BCG ni dans les mycobactéries environnementales sauf pour 3 d’entre elles ( qui peuvent donc positiver un test quantiferon) :  Myxcobacterium Kansaii, mycobacterium Szulgai et mycobacterium Marinum.

Le test QuantiFERON est donc plus spécifique, il n’est pas positivé par une vaccination BCG ou par un contact avec des mycobactéries non tuberculeuses.

L’IDR stimule 2 populations de lymphocytes alors que les tests IGRA n’en stimulent qu’une

On distingue 2 populations de lymphocytes :

Les lymphocytes T effecteurs qui ont besoin de l’antigène pour exister : ils produisent de l’IFN gamma après quelques heures de stimulation.
Les lymphocytes T mémoire : lors du test IGRA, si l’incubation se prolonge au delà de 24 H, on  réveille les lymphocytes T mémoire, c’est comme une cicatrice immunitaire de l’infection. Ces lymphocytes T mémoire sécrètent également de l’interferon, mais ils doivent se différencier et n’ont donc une production significative d’IFN gamma qu’au bout de 24 H.

Avec l’IDR on stimule ces 2 populations de lymphocytes, à la fois les lymphocytes T effecteurs et les lymphocytes T mémoire, alors qu’avec le test quantiFERON on ne stimule que les lymphocytes T effecteurs.

L’IDR ne se négative donc jamais car elle stimule les lymphocytes T mémoire centrale.

Précautions à observer pour la réalisation du du test quantiFERON

Lors de la réalisation d’un test IGRA, il faut bien agiter le tube puisque l’antigène se trouve sur  les parois et les tubes ne doivent pas être placés au froid (car il bloque les lymphocytes). L’incubation est ensuite réalisée à 37°, température du corps.

La période critique pour ces tests de détection de l’interféron gamma se situe donc avant l’incubation.

L’incubation est de 24 H pour un test quantiFERON : la plupart des lymphocytes ont sécrété l’interféon et si l’on prolongeait au delà de 24 heures, on stimulerait les lymphocytes mémoire centrale ( ce qui conduirait à dépister une infection ancienne) or le test QuantiFERON est destiné au dépistage des  infections tuberculeuses actuelles et non des infections anciennes et éradiquées.
L’ incubation est de 3 jours pour une IDR.

Quand utiliser l’IDR, quand utiliser un test IGRA ( interferon gamma ) ?

La HAS, Haute Autorité de Santé, a produit des recommandations en 2006, puis  en 2011

La HAS a autorisé l’utilisation au choix des tests IGRA ou de l’IDR dans cette indication.

« les sujets contacts d’un cas index contagieux :
ces sujets font l’objet d’un dépistage dans le but de diagnostiquer des tuberculoses maladies secondaires ou des infections tuberculeuses latentes..
Il repose sur une radiographie pulmonaire et un examen clinique à la recherche d’une tuberculose maladie et un test immunologique (IDR ou test IGRA)
chez les personnes âgées de plus de 15 ans depuis 2006) à la recherche d’une infection tuberculeuse latente.
les professionnels de santé et autres professionnels exposés dont les étudiants et stagiaires :
il existe des recommandations de dépistage particulières compte tenu de leur risque d’exposition et du risque de transmission aux malades dont ils ont la charge (avisdu CSHPF du 15 novembre 2002)

  • à l’embauche : un examen clinique de référence doit être effectué, complété systématiquement d’une radiographie pulmonaire et d’une IDR datant de moins de trois mois ;
  • en cours d’activité professionnelle, la surveillance est différente selon le niveau de risque.

Recommandations du HCSP 2011 : utilité des tests IGRA dans différentes situations

Le Haut Conseil de la Santé publique recommande d’utiliser des tests de détection de l’interféron Gamma pour diagnostiquer une infection tuberculeuse latente à la fois pour les actions de dépistage et de surveillance chez les professionnels de santé et pour des enquêtes autour des cas dont l’objectif est le dépistage d’infection récente.

Recommandations du HCSP de 2011

« Personnels de santé (y compris stagiaires et étudiants)
Pour les personnels de santé, il est recommandé :
-de réaliser un test IGRA de référence lors de l’embauche si l’IDR est > 5 mm ;
– de limiter la réalisation de tests IGRA en surveillance, quel que soit le niveau de risque tuberculeux d’un service, aux seuls cas d’exposition documentée à un cas index contagieux « 

En pratique, suite à un contage, on peut réaliser une IDR en première intention et si l’IDR est positive on réalise ensuite un test IGRA.

Tuberculose et tests de détection de l’interféron Gamma : technique IDR et IGRA

Quel délai est nécessaire entre la réalisation d’une IDR et d’un test IGRA ?

Les premières recommandations de 2006 disaient de tenir compte de IDR faite dans le mois précédents. On suspecte que l’IDR  peut positiver un test QuantiFERON  car dans l’IDR on retrouve des antigènes utilisés dans le test QuantiFERON. Certaines études retrouvent cet effet boosteur mais pas toutes…

Si l’IDR est positive, on peut faire un test de détection de l’inteféron γ juste à la lecture ou idéalement au bout de 1 mois.

Etude rétrospective en 2013 pour comparer IDR et IGRA

Une étude rétrospective a été conduite au service de médecine du travail de l’Hôpital de Nantes ( Hôpital de référence pour la prise en charge de la tuberculose dans la région)
The effect of introducing IGRA to screen french healthcare workers for tuberculosis and potential conclusions for the work organisation

Les tests IGRA ont été introduits en 2007 : le test IGRA a été utilisé si l’IDR était positive ou contre-indiquée ou refusée;

637 personnels de santé ont bénéficié d’un test QuantiFERON, 466 d’une IDR, en dépistage ( embauche et contage).
Un nouveau test QuantiFERON a été réalisé pour 118 personnes quelques mois ou 1 an plus tard pour observer l’évolution du test QuantiFEROn dans le temps.

637 personnes ont eu un test QuantiFERON
141 été  positifs soit 22%
493 ont été négatifs soit 77,6%
3 ont été indéterminés

466 personnes ont bénéficié d’une IDR
107 IDR négatives, soit 22,6 %
358 IDR positives, soit 77,4 %

Parmi les 107 IDR négatives :
92 tests QuantiFERON  négatifs soit 86 %
15   tests QuantiFERON positifs  soit14%

Pour les 359 IDR positives :
Test QuantiFERON  négatif chez 263 soit 73%
et 96 tests QuantiFERON positif soit 27 %

L’IDR surestime la prévalence de la tuberculose, mieux vaut se baser sur le test IGRA pour instaurer un traitement.

Cette étude conduite à l’hôpital de Nantes a surtout permis d’observer qu’il y avait un taux élevé de tests QuantiFERON positifs chez les soignants inclus dans cette étude, des mesures de prévention  doivent être mise en oeuvre (porter des masques, etc)

Le taux d’infections tuberculeuses latente suscite des préoccupations, sa prévention doit être améliorée afin d’améliorer la lutte contre la tuberculose maladie. Les tests IDR et IGRA permettent tous deux de diagnostiquer une infection tuberculeuse latente : l’IDR a plus de 100 ans, ne coûte pas cher, mais c’est un test moins sensible et moins spécifique  que le test IGRA : on observe beaucoup de faux positifs avec l’IDR. Même lorsque l’IDR est très fortement positive, il faudrait réaliser un test IGRA pour confirmer l’infection tuberculeuse latente  qui nécessite un traitement. Instaurer un traitement en se basant seulement sur une IDR positive peut conduire à traiter une primo infection ancienne. Par contre les tests IGRA sont nettement plus onéreux que les IDR, puisqu’ils coûtent 40 à 100 €…
Chez les professionnels de santé, il est recommandé de réaliser un test IGRA de référence lors de l’embauche lorsque  l’IDR est > 5 mm et en surveillance de réaliser des tests IGRA pour les enquêtes autour d’un cas de tuberculose contagieuse.

Tableaux des maladies professionnelles associés :

  Tableau n°40 RG : Maladies dues aux bacilles tuberculeux et à certaines mycobactéries atypiques (/CMycobacterium avium/intracellulare, /CMycobacterium kansasii, (49,8 KiB, 19 196 hits)

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