Un employeur peut désormais interdire toute consommation d’alcool dans son entreprise !
Un décret du 3 juillet 2014 autorise désormais l’employeur à interdire la consommation d’alcool dans l’entreprise, en insérant une clause spécifique dans le règlement intérieur, ou en diffusant une note de service. Jusqu’à présent l’employeur devait parvenir à répondre à son obligation générale de santé et sécurité en matière de consommation d’alcool dans son entreprise sans toutefois pouvoir interdire la consommation de toute boisson alcoolisée dans l’entreprise. Il est désormais autoriser à le faire dès l’instant que la consommation de boissons alcoolisées est susceptible de porter atteinte à la sécurité et la santé physique et mentale des travailleurs.
Dans un arrêt du 12 novembre 2012, le Conseil d’Etat avait considéré qu’un règlement intérieur ne pouvait pas interdire de manière générale et absolue la consommation d’alcool dans une entreprise, en l’absence de situation particulièrement grave ou de risque :
« Les dispositions du règlement intérieur d’une entreprise prévoyant que la consommation de boissons alcoolisées est interdite y compris dans les cafeterias, au moment des repas et pendant toute autre manifestation organisée en dehors des repas, faute d’être fondées sur des éléments caractérisant l’existence d’une situation particulière de danger ou de risque, excèdent, par leur caractère général et absolu, les sujétions que l’employeur peut légalement imposer.
66-03-01 Les dispositions du règlement intérieur d’une entreprise prévoyant que la consommation de boissons alcoolisées est interdite y compris dans les cafeterias, au moment des repas et pendant toute autre manifestation organisée en dehors des repas, faute d’être fondées sur des éléments caractérisant l’existence d’une situation particulière de danger ou de risque, excèdent, par leur caractère général et absolu, les sujétions que l’employeur peut légalement imposer. »
Le décret du 3 juillet 2014 justifie ainsi cette nouvelle possibilité offerte aux employeurs :
« Dans un contexte où, d’une part, l’alcool est la substance psychoactive la plus consommée et les consommations ponctuelles importantes ainsi que les ivresses déclarées en augmentation parmi les actifs, et où, d’autre part, la responsabilité civile et pénale des employeurs est particulièrement engagée, le présent décret vise à donner aux employeurs les moyens d‘assumer l’obligation de sécurité de résultat qui leur incombe en matière de préservation de la santé et de la sécurité des travailleurs, et de prévenir tout risque d’accident. Il autorise ainsi les clauses des règlements intérieurs limitant ou interdisant la consommation de toute boisson alcoolisée dans l’entreprise édictées dans un objectif de prévention, y compris le vin, la bière, le cidre et le poiré, lorsqu’elles sont proportionnées au but recherché ».
L’article R4228-20 du code du travail autorisait jusqu’à présent la consommation de vin, de bière, de cidre, et de poiré sur les lieux de travail.
Cet article est désormais est complété par ce paragraphe :
» Lorsque la consommation de boissons alcoolisées, dans les conditions fixées au premier alinéa, est susceptible de porter atteinte à la sécurité et la santé physique et mentale des travailleurs, l’employeur, en application de l’article L. 4121-1 du code du travail, prévoit dans le règlement intérieur ou, à défaut, par note de service les mesures permettant de protéger la santé et la sécurité des travailleurs et de prévenir tout risque d’accident. Ces mesures, qui peuvent notamment prendre la forme d’une limitation voire d’une interdiction de cette consommation, doivent être proportionnées au but recherché. «
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Je constate que le nouvel article R 428-20 du code du travail précise que les « mesures, qui peuvent notamment prendre la forme d’une limitation voire d’une interdiction de cette consommation, doivent être proportionnées au but recherché. » Par conséquent, le législateur a bien ouvert une possibilité d’interdiction, mais ayant précisé la nécessité d’une proportionnalité, rend incertain la validité de son application par une entreprise. La rédaction de cet article est dans la ligne de l’article L. 1121-1 du Code du travail, qui ouvre souvent une possibilité de discussion juridique devant les tribunaux sur la limite entre ce qui est autorisé aux salariés et ce qui est interdit parce qu’abusif, et sur ce que les employeurs peuvent légitimement inscrire dans le règlement intérieur de l’entreprise.