Renforcer la négociation collective : surtout la simplifier dans les petites entreprises
Une des 5 ordonnance de septembre 2017 décline les 4 axes de la réforme du code du travail en une série de mesures visant à renforcer la négociation collective dans les entreprises, notamment rendre la négociation plus simple dans les petites entreprises, surtout dans les entreprises de moins de 50 salariés puisque seulement 4% d’entre elles ont un délégué syndical pour négocier un accord collectif. Or la moitié des salariés français travaillent dans des entreprises de moins de 50 salariés. Cette ordonnance a été ratifiée par la loi du 29 mars 2018.
Ordonnance n° 2017-1385 du 22 septembre 2017-
Droit à la négociation des petites et moyennes entreprises
Négociation collective :donner aux entreprises la capacité d’anticiper et de s’adapter plus simplement et plus vite
Des droits garantis pour les salariés dans la négociation collective
Nouvelles garanties pour les syndicats et les élus du personnel qui s’engagent dans le dialogue social
Cet article présente les principales nouveautés apportées par cette ordonnance.
Ordonnance n° 2017-1385 du 22 septembre 2017
Parmi les 5 ordonnances, l’ordonnance n° 2017-1388 du 22 septembre 2017 comporte diverses mesures relatives au cadre de la négociation collective tandis que l’ordonnance n° 2017-1385 du 22 septembre 2017 est relative au renforcement de la négociation collective
Un rapport relatif à cette ordonnance qui concerne le renforcement de la négociation collective a été publié dans le même temps.
Cette ordonnance n° 2017-1385 a été ratifiée par la loi n° 2018-217 du 29 mars 2018
Droit à la négociation des petites et moyennes entreprises
La négociation sera désormais simple et accessible pour les entreprises de moins de 50 salariés car l’employeur pourra négocier directement avec un élu du personnel ou alors directement avec ses salariés sur tous les sujets ouverts à la négociation : rémunération, temps de travail, organisation du travail, etc
En effet seules 4 % des entreprises entre 11 et 50 salariés ont un délégué syndical pour négocier un accord collectif. C’est le cas dans les deux tiers des entreprises entre 50 et 300 salariés, et dans 90 % des entreprises au-delà de 300 salariés.
Les salariés pourront prendre connaissance du projet d’accord qui leur est soumis et pourront s’adresser aux organisations syndicales départementales s’ils le souhaitent pour se forger leur opinion avant la consultation.
L’accord sera validé si les deux tiers des salariés l’approuvent.
Cette possibilité sera offerte à toutes les entreprises de moins de 20 salariés qui n’ont pas d’élu du personnel.
De plus les accords de branche devront prendre en en compte les spécificités et la réalité des très petites et moyennes entreprises.
Négociation collective :donner aux entreprises la capacité d’anticiper et de s’adapter plus simplement et plus vite
Les entreprises pourront anticiper et s’adapter rapidement aux évolutions à la hausse ou à la baisse du marché par des accords majoritaires simplifiés sur le temps de travail, la rémunération et la mobilité, grâce à la fusion des accords de réduction du temps de travail, maintien dans l’emploi, mobilité interne, préservation de l’emploi et à leur simplification.
Le compte personnel de formation sera abondé de 100 heures financé par l’employeur, en cas de refus par le salarié d’un tel accord.
De nouveaux champs de négociation seront ouverts à l’entreprise, notamment s’agissant des primes décidées dans les branches :
si des salariés, via leurs représentants élus, préfèrent bénéficier de primes pour l’innovation, ou pour la garde d’enfant au lieu de primes d’ancienneté, cela sera désormais possible.
En l’absence d’accord d’entreprise majoritaire,
ce sera tout comme aujourd’hui, l’accord de branche qui s’appliquera.
Les accords collectifs bénéficieront d’une présomption de conformité à la loi :
selon le principe du code civil, réaffirmé par la Cour de cassation en janvier 2015, ce sera à la partie contestant l’accord d’apporter la preuve de ses allégations.
Des droits garantis pour les salariés dans la négociation collective
Les salariés auront la garantie que les accords négociés seront légitimes et refléteront leur intérêt, car l’ensemble des accords d’entreprise devront être majoritaires à partir du 1er mai 2018.
De plus, le rôle de la branche sera clarifié et l’articulation des accords de branches et d’entreprise clarifiée.
Des nouvelles compétences sont confiées aux branches professionnelles, notamment en matière de gestion et de qualité de l’emploi, permettant d’assurer davantage d’équité entre les salariés d’un même secteur.
L‘égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, l’insertion des personnes handicapées ou encore la prévoyance pourront faire l’objet de mesures qui s’appliqueront dans toutes les entreprises de la branche.
Nouvelles garanties pour les syndicats et les élus du personnel qui s’engagent dans le dialogue social
Les branches seront incitées à conclure des accords sur la valorisation des compétences acquises au cours d’un mandat : économiques, sociales, managériales.
Un observatoire de la négociation sera créé,
il pourra s’adosser sur les observatoires départementaux créés par cette ordonnance.
Il s’intéressera :
- à la progression de la négociation,
- à l’implantation des délégués syndicaux et des élus dans toutes les tailles d’entreprise.
Il sera aussi compétent pour le suivi de la discrimination syndicale, et pourra formuler des propositions pour mettre fin à ces pratiques.
L’articulation entre conventions de branche et conventions d’entreprise est modifiée .
Le rôle de la branche est renforcé dans sa fonction de régulation économique et sociale mais elle doit laisser davantage d’initiative à l‘accord d’entreprise dans les autres domaines,
Matières dans lesquelles la convention de branche peut décider qu’elle prévaut sur l’accord d’entreprise. :
- prévention des effets de l’exposition aux facteurs de risques professionnels énumérés à l’article L. 4161-1,
- insertion professionnelle,
- maintien dans l’emploi des travailleurs handicapés,
- effectif à partir duquel des délégués syndicaux peuvent être désignés, leur nombre et la valorisation de leurs parcours syndical
- primes pour travaux dangereux ou insalubres.
Dans ces domaines verrouillés par la loi ou par la convention de branche, les accords d’entreprise ne peuvent prévoir que des garanties au moins équivalentes à celles de la convention de branche, cette équivalence devant être appréciée domaine par domaine.
La convention de branche doit comporter des stipulations spécifiques pour les entreprises de moins de cinquante salariés, si ce n’est pas le cas elle doit justifie des motifs pour lesquels elle n’en comporte pas.
4 dispositifs conventionnels préexistants sont unifiés :
- accords de réduction du temps de travail,
- accords de maintien de l’emploi,
- accords en faveur de la préservation ou du développement de l’emploi
- accords de mobilité professionnelle ou géographique interne.
Les conditions de recours à ces accords sont simplifiés et les conséquences d’un refus de l’accord par le salarié sont harmonisées.
Ainsi le licenciement du salarié qui refuse l’application des stipulations de l’accord à son contrat de travail repose sur un motif spécifique et l’employeur est tenu d’abonder le compte personnel de formation de ce dernier ( modalités seront définies par décret.).
Instauration d’une présomption simple de conformité de la convention ou de l’accord collectif à la loi.
Cette présomption vise le contenu de l’accord, ses conditions de validité ainsi que le déroulement des négociations.
Il appartient donc à celui qui conteste la légalité de l’accord d’apporter la preuve de ce qu’il allègue. Cette présomption vise à la fois à codifier dans le code du travail un principe du droit civil selon lequel c’est à la partie requérante d’apporter la preuve de ses allégations, et à reprendre la jurisprudence de la Cour de cassation en la matière.
Ensuite, le délai de contestation d’une convention ou d’un accord collectif est limité à un délai de 2 mois. Le point de départ dudit délai est précisé et adapté selon que l’accord contesté est un accord d’entreprise ou un accord de branche.
L’accord collectif détermine la périodicité et le contenu des consultations des négociations obligatoires. Une nouvelle architecture à trois niveaux est mise en place :
- l’ordre public, que tous les accords doivent respecter,
- le champ de la négociation collective,
définissant l’articulation la plus pertinente au niveau de la branche ou de l’entreprise - dispositions supplémentaires applicables en l’absence d’accord de branche ou d’accord d’entreprise.
Ces articles ouvrent largement le champ de la négociation et donnent la possibilité à la branche et l’entreprise de définir, par un accord global d’une durée maximale de 4 ans, le calendrier, la périodicité, les thèmes et les modalités de négociation.
Tous les thèmes des négociations obligatoires doivent faire l’objet d’une négociation au minimum une fois sur cette période.
En l’absence d’un tel accord ou en cas de non-respect de ses stipulations, les thèmes et les périodicités des négociations obligatoires de branche et d’entreprise existant actuellement sont maintenus.
Un accord portant sur le contenu de l’une ou l’autre des négociations obligatoires peut également prévoir d’adapter sa périodicité, dans la limite de quatre ans.
Accès de toutes les entreprises à l’accord collectif
Les nouvelles dispositions prévoient un dispositif adapté en fonction de la taille de l’entreprise, dans les entreprises sans délégué syndical.
Négociation en fonction de l’effectif de l’entreprise
- Entreprises de moins de 11 salariés ou effectif est compris entre 11 et 20 salariés et qui ne disposent pas de membre de la délégation du comité social et économique :
l’employeur peut proposer un projet d’accord aux salariés ,
pour être valide, il doit avoir été approuvé à la majorité des deux tiers par les salariés, sur le modèle de l’approbation des accords d’intéressement ; - Entreprises dont l’effectif habituel est compris entre 11 et 50 salariés,
l’employeur pourra négocier- soit avec un salarié (membre du comité social et économique ou non) mandaté par une organisation syndicale,
- soit avec un membre de la délégation du personnel au comité social et économique ;
- Entreprises de plus de 50 salariés,
les règles antérieures à la présente ordonnance perdurent,- obligation de négocier avec un membre de la délégation du personnel du comité social et économique mandaté
- si aucun de ces membres n’a souhaité se faire mandater,
par un membre non mandaté, - et si aucun membre de la délégation du personnel n’a souhaité négocier, avec un salarié mandaté.
Création d’un Observatoire d’analyse et d’appui au dialogue social et à la négociation dans les entreprises de moins de cinquante salariés au niveau départemental
C’est un observatoire tripartite (membres, salariés et employeurs ayant leur activité dans la région et représentants de l’autorité administrative) :
- il sera animé par un responsable de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi en expertise et en appui.
- il pourra être saisi par toute organisation syndicale de salariés ou professionnelle d’employeurs de difficultés rencontrées dans le cadre d’une négociation.
Nouveau délai de contestation de 2 mois du code du travail
il s’applique aux conventions ou accords conclus postérieurement à sa date d’entrée en vigueur.
Délai d’un an pour les partenaires sociaux qui avaient décidé, depuis 2004, que l’accord de branche prévaut sur l’accord d’entreprise pour confirmer leur décision.
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