Lorsque le travail, qui est une vertu partagée, devient une addiction…

Travailler de façon excessive et compulsive, mais également dépenser beaucoup d’énergie pour un piètre résultat sont en faveur d’une addiction au travail . De nombreuses études montrent que l’addiction au travail est associée à des troubles du sommeil, des atteintes à la santé, des états de stress voire de burn out et génèrent des difficultés à la fois dans la vie au travail et la vie personnelle, il est donc important de la diagnostiquer. Plusieurs échelles sont disponibles pour repérer l’addiction au travail qui doit être prise en charge au même titre que n’importe quelle addiction. La plupart des travaux publiés dans ce domaine sont issus de la recherche scandinave et japonaise. 

Addictions dans la classification DSM V
Addiction au travail : définition selon le modèle norvégien
Les 2 tests les plus utilisés pour diagnostiquer l’addiction au travail 
Echelle WCS pour évaluer le craving au travail ( dépendance psychologique au travail)
Test DUWAS : Dutch work addiction scale

Le congrès annuel de l’ACESM, Association corse équilibre et santé mentale, qui s’est tenu à Bastia en novembre 2014 a centré ses débats sur le travail. Le Professeur Amine Benyamina, spécialiste des addictions a réalisé une communication à propos de l’addiction au travail.
La rédaction du site AtouSante qui a participé et assisté à ce congrès propose des informations recueillies à cette occasion, notamment les outils disponibles pour évaluer l’addiction au travail (Workaholism).

Addictions dans la classification DSM V

Lors de la refonte du DSM IV, les addictions sans produits (addiction au travail, addiction au jeu), c’est à dire les addictions comportementales ont fait objet de débats entre experts.
La cinquième édition du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-V), combine en un seul diagnostic : trouble d’utilisation de substance, à la fois  le diagnostic d’abus de substance et le diagnostic de dépendance à une substance du DSM-IV.
Les critères diagnostiques de trouble d’utilisation de substances sont presque identiques aux critères combinés de l’abus de substance et de dépendance du DSM-IV mais un nouveau critère de fort désir ou besoin (craving) d’utiliser la substance a été ajouté.
Dans le DSM IV la classification était catégorielle, elle est dimensionnelle dans le DSM V :

Addiction au travail : définition selon le modèle norvégien

La psychologue Cecilie Andreassen, de l’Université norvégienne de Bergen a fait de nombreux travaux sur l’addiction au travail.

Selon le Centre Bergen, l’addiction peut-être :

  • quantitative = une personne qui travaille plus de 50 h par semaine,
  • ou bien qualitative = le temps et l’énergie investis sont supérieures aux exigences du poste

L’ addict au travail serait une personne qui  travaille beaucoup pour un piètre résultat…

La définition de l’addiction au travail peut inclure:

  • un investissement important dans le travail,
  • beaucoup de temps consacré au travail,
  • un travail fourni bien supérieur aux exigences du poste,
  • des pensées obsessionnelles par rapport au travail.

Test BWAS, Bergen work addiction scale

Ce test BWAS utilise 7 critères pour repérer les addicts au travail.

Vous vous demandez comment libérer du temps pour travailler davantage

  • Jamais
  • Rarement
  • Parfois
  • Souvent 
  • Toujours 

Vous consacrez bien plus de temps à travailler qu’initialement prévu

  • Jamais
  • Rarement
  • Parfois
  • Souvent 
  • Toujours 

Vous travaillez en vue de diminuer vos sentiments de culpabilité, anxiété, impuissance et dépression

  • Jamais
  • Rarement
  • Parfois
  • Souvent 
  • Toujours 

Votre entourage vous a conseillé de réduire votre temps de travail mais vous ne l’avez pas écouté

  • Jamais
  • Rarement
  • Parfois
  • Souvent 
  • Toujours 

Vous êtes stressé si l’on vous empêche de travailler

  • Jamais
  • Rarement
  • Parfois
  • Souvent 
  • Toujours 

Les loisirs et l’activité physique ne sont pas vos priorités en raison du travail

  • Jamais
  • Rarement
  • Parfois
  • Souvent 
  • Toujours 

Vous travaillez tellement qu’il y a des effets néfastes sur votre santé

  • Jamais
  • Rarement
  • Parfois
  • Souvent 
  • Toujours 

Répondre “Souvent” ou “toujours” à au moins 4 de ces questions est en faveur d’une addiction au travail

Les 2 tests les plus utilisés pour diagnostiquer l’addiction au travail

Test de WART, WORK ADDICTION RISK TEST,

Version française du test addiction au travail,  de Bryan Robinson

L’addiction au travail serait plutôt chez des personnes de comportement de type À

Le test de WART comporte 25 questions avec 4 propositions.
1. Je préfère faire les choses moi-même plutôt que de demander de l’aide.

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

2. Je suis impatient quand je dois attendre l’aide d’un autre ou quand une tâche prend trop de temps.

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

3. J’ai l’impression d’être pressé, de courir contre la montre.

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

4. Je suis irrité quand on m’interrompt au milieu d’une activité.

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

5. J’ai plusieurs fers au feu. Je suis tout le temps occupé.

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

6. Je fais plusieurs choses en même temps (manger, lire, répondre au téléphone).

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

7. Je m’implique trop dans mon travail. Je prends des engagements qui dépassent mes capacités de travail.

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

8. Je me sens coupable quand je ne travaille pas.

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

9. Il est important pour moi de voir les résultats concrets de ce que je fais.

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

10. Je suis plus intéressé par le résultat final de ce que je fais que par la manière d’y arriver.

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

11. Les choses ne vont jamais assez vite pour moi.

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

12. Je perds patience, je m’énerve quand les choses ne vont pas au rythme qui me convient.

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

13. Je pose plusieurs fois les mêmes questions sans me rendre compte que j’ai déjà reçu une réponse.

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

14. Pendant que je m’occupe des tâches actuelles, je pense en même temps aux tâches futures et à la manière de les organiser et planifier..

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

15. Je continue à travailler alors que mes collègues ont quitté le bureau.

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

16. Je suis irrité quand les personnes de mon entourage ne correspondent pas à ce que j’attends d’elles,

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

17. Je suis en colère dans les situations que je ne peux pas contrôler.

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

18. J’ai tendance à me mettre sous pression, à m’imposer des dead lines quand je travaille

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

19 : j’ai du mal à me détendre quand je ne travaille pas

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

20 : je passe plus de temps à travailler qu’avec  mes amis, ma familole ou à pratiquer des loisirs, des activités physiques

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

21 Je plonge dans les projets tête baissée avant même que toutes les phases soient finalisées pour prendre de l’avance

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

22 Je ne supporte pas mes erreurs même les plus anodines.

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

23 Je m’investis plus dans mon travail que dans mes relations avec mes proches

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

24 : il m’arrive souvent d’oublier des réunions de famille, des anniversaires, des vacances

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

25 Je prends des décisions importantes avant même de connaître les tenants et les aboutissants

  • Jamais : 1
  • Parfois : 2
  • Souvent : 3
  • Toujours : 4

Entre 57 et 66 points les personnes sont en danger, de 67 à 100 points, il existe une addiction au travail.

WorkBAT : Workaholism Battery

Ce test WorkBAT  permet de repérer 2 types d’addicts : les enthousiastes et les non enthousiastes.

Echelle WCS pour évaluer le craving au travail ( dépendance psychologique au travail)

Cette échelle WCS permet d’évaluer le craving au travail, c’est à dire la dépendance psychologique au travail. Elle résulte de travaux polonais.
En cas de craving au travail, le  travail manque quand la personne  s’arrête de travailler. Des états de burn out peuvent être observés.

L’échelle WCS  comporte 28 items répartis en 4 sous échelles  puisque 4 composantes sont identifiés dans le work craving :

  • obsession, compulsion à travailler,
  • anticipation de la récompense, rehausse de l’estime de soi par le travail,
  • anticipation de la réduction des aspects négatifs de l’absence de travail,
  • perfectionnisme excessif.

Quelques exemples de question de l’échelle WCS

  • Je désire travailler de plus en plus
  • J’ai juste besoin de travailler maintenant
  • Quand je ne travaille pas il est difficile de penser à autre chose
  • Si je ne travaille pas il m’est dur de me sentir comblée
  • Lorsque je travaille beaucoup je me sens compétente.
  • Si je ne fixe pas la barre assez haute je vais finir subalterne
  • Si quelqu’un travaille mieux que moi je me sens abattue.

Test DUWAS : Dutch work addiction scale

L’addiction au travail s’approche d’un trouble compulsif et obsessionnel.

Le test de DUWAS comporte 9 questions qui évaluent le travail excessif et 7 questions qui évaluent le travail compulsif. 4 questions explorent le temps de travail.

Comme toute addiction, l’addiction au travail doit être prise en charge compte tenu de ses répercussions possibles sur la santé. Le traitement a pour objectif de redonner au travail sa seule et unique position. Aucun essai clinique n’a été réalisé à ce jour.  Il faut entreprendre une démarche classique en addictologie c’est à dire une éducation à la modération. Les thérapies cognitivo comportementales peuvent s’avérer efficaces. La psychologie positive permettra d’aborder avec le patient la place que le travail a pris dans sa vie.

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