Prise en compte de la pénibilité pour un départ anticipé à la retraite

L’exposition d’un salarié de droit privé à un ou plusieurs facteurs de pénibilité au-delà des seuils d’exposition qui devraient être prochainement fixés par décret, lui ouvrira des droits qui prendront la forme de points : ces points s’accumuleront sur le C3P, Compte Personnel de Prévention de la Pénibilité, proposé en juin 2013 par le rapport Moreau. Le salarié pourra alors utiliser les points acquis de diverses manières, par exemple obtenir sa retraite avant l’âge légal. Ce nouveau dispositif va coexister avec le dispositif instauré par la loi de 2010, qui autorisait également un départ anticipé à la retraite dans la mesure où le salarié avait un  taux d’IPP résultant d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle.

Nombre de points acquis en fonction de l’exposition aux facteurs de risque de pénibilité
Trois manières d’utiliser les points du compte personnel de prévention de la pénibilité
Deux dispositifs de départ anticipé à la retraite en lien avec la pénibilité vont prochainement coexister

La nouvelle loi sur les retraites introduit la notion de seuils d’exposition aux facteurs de risque de pénibilité  : il y a une situation de pénibilité si le travailleur est exposé au-delà de certains seuils à un ou plusieurs facteurs de risque reconnu comme source de pénibilité. Des décrets d’application ont été publiés pour fixer ces seuils.

Nombre de points acquis en fonction de l’exposition aux facteurs de risque de pénibilité

Le nouveau dispositif qui est en cours d’élaboration va permettre à un salarié exposé à la pénibilité d’acquérir des points qui vont se cumuler sur son compte personnel de prévention de la pénibilité

  • Un salarié exposé pendant un an à un facteur de risque professionnel de pénibilité va acquérir 4 points par année civile
    et s’il est exposé à plusieurs facteurs de risque professionnels de pénibilité, il obtiendra 8 points par année.
  • Si le salarié exposé a un contrat qui commence ou finit en cours d’année, il va acquérir 2 points par trimestre d’exposition à plusieurs facteurs de risque et 1 point par trimestre s’il est exposé seulement à un facteur de risque de pénibilité.

Trois manières d’utiliser les points du compte personnel de prévention

 Le salarié pourra choisir d’utiliser ses points pour majorer son assurance vieillesse et donc bénéficier d’un départ à la retraite avant l’âge légal

Les points pourront être utilisés pour majorer la durée d’assurance vieillesse : les trimestres supplémentaires ainsi acquis seront réputés avoir donné lieu à cotisations pour l’application du dispositif carrières longues.

10 points vont ouvrir droit à un trimestre de majoration d’assurance vieillesse.

La liquidation des points acquis sur le compte ne pourra intervenir qu’à partir de 55 ans ( Code du travail article L 4162-4, II) et le nombre de points pouvant figurer sur le compte sera plafonné à 100 points sur toute la carrière du salarié , limitant ainsi à 2 ans l’anticipation de l’âge normal de départ à la retraite (nouvel article L 161-17-4 du Code de la Sécurité sociale), puisque 20 points sont nécessairement consacrés à la formation, il reste 80 points donc 8 trimestres.
Le Compte personnel de prévention de la pénibilité devrait entrer en vigueur au 1er janvier 2016 et non au 1er janvier 2015 comme cela avait été initialement prévu, et ne concernera que les expositions constatées à compter de l’entrée en vigueur de ce compte C3P.

Le salarié pourra choisir d’utiliser les points acquis pour financer une formation professionnelle pour accéder à un emploi non exposé ou moins exposé aux facteurs de risque de pénibilité

Les 20 premiers points figurant sur le compte devront nécessairement être utilisé pour financer une formation : chaque point permettra d’acquérir 25 heures de formation.

Un salarié pourra ainsi bénéficier de 500 heures de formation.

Le salarié pourra choisir d’utiliser ses points pour réduire son temps de travail

10 points ouvriront droit à un complément de rémunération dont le montant correspondra à la compensation pendant 3 mois d’une réduction du temps de travail égale à un mi-temps.

Deux dispositifs de départ anticipé à la retraite en lien avec la pénibilité vont prochainement coexister

 Régime issu de la loi du 9 novembre 2010 : l’assuré doit être atteint d’une incapacité permanente d’origine professionnelle

Ce régime est donc très restrictif par rapport au nouveau dispositif qui se met en place.

Loi de 2010 : conditions pour bénéficier d’un départ anticipé à la retraite

Pour bénéficier d’un départ anticipé à la retraite, l’assuré doit avoir une IPP, Incapacité permanente partielle,  d’au moins 20% qui résulte d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle
ou si l’IPP est comprise entre 10 et 20% il faut en plus que l’assuré puisse justifier d’une exposition d’au moins 17 ans à un ou plusieurs facteurs de pénibilité définis par le Code du travail.

Régime issu de la dernière réforme des retraites, loi du 20 janvier 2014 qui sera prochainement en vigueur ( textes en cours de rédaction)

L’incapacité permanente partielle ne sera plus exigée. Le fait d’avoir été exposé à des facteurs de pénibilité ouvrira des droits à l’assuré : les points acquis sur son compte C3P pourront lui permettre d’acquérir des trimestres supplémentaires donc de majorer sa durée d’assurance vieillesse et ainsi de partir au maximum 2 ans avant l’âge légal.

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Il y a 8 commentaires sur cet article
  1. Hello !
    J’ai une lecture un peu différente de certains aspects de la « pénibilité V2″ qui s’annonce (cf projets des décrets et arrêtés, dont on attend la publication en août ?) qui m’amène à ces qq remarques :
    – Le titre de cet article ne devrait pas en rester à la seule notion de départ anticipé à la retraite mais devrait plutôt être qqchose comme  » Prise en compte de la pénibilité pour aménager la fin du parcours professionnel des salariés exposés ».
    – Dire « A priori ces seuils [de pénibilités] se situeront en deçà des valeurs limites d’exposition qui existent pour certains risques » est une lapalissade qui aura échappé à la plume notre chère administratrice.
    – Pour moi la pénibilité V2 va couvrir la pénibilité V1 : je ne vois rien montrant la co-existence prochaine des deux dispositifs de compensation de la pénibilité au travail. Mais par contre je suis inquiet de voir que justement rien n’est dit de l’ordre de l’articulation (récupération ?) des pénibilités des années 2012 à 2014 normalement consignées dans les FiPE actuelles… Elles sont passées par pertes et profits ?
    – Je ne présenterais la date d’entrée en vigueur de la pénibilité V2 comme l’article le fait : le (futur) nouveau dispositif devrait bien commencer dès janvier 2015 (comprendre que les seuils de pénibilité réglementaires devront servir à déterminer les pénibilités effectives dès le 1er janvier 2015). Mais comme cette tracabilité sera annuelle (nouveau !), effectivement la FiPE 2015 de chaque salarié concerné ne pourra être bouclée, remise au salarié (nouveau !) et transmise au MT qu’en janvier 2016. Idem pour la DADS 2015 avec dénombrement nominatif d’une ou plusieurs pénibilités (nouveau !).
    – De plus on sait que la pénibilité V2 ne portera en 2015 que sur les trois pénibilités « rythmes de travail » + la pénibilité « hyperbare ».
    – L’article ne dit rien d’une autre nouveauté en amont du dispositif V2 consistant dans le fait que le DUER devra contenir les données collectives d’expositions aux risques « pénibles » anticipant et facilitant l’établissement des FiPE le cas échéant. De fait cet ajout au DUER devra être engagé dès janvier 2015 (dans 5 mois !), ce sera la 1ère manifestation de la « nouvelle » pénibilité.
    Bye.

  2. Hello !
    Je reviens sur une de mes remarques, celle doutant de la co-existence de deux dispositifs de départ anticipé à la retraite en lien avec la pénibilité, pour la moduler : outre le dispositif du CPPP, en l’état les projets de textes qu’on connaît pour la « pénibilité V2 » ne remettent effectivement pas en cause la possibilité pour un salarié ayant été en pénibilité au travail au moins 17 ans de bénéficier d’une retraire anticipée à condition d’avoir un certain niveau d’IPP (L351-1-4 + D351-1-10).
    Si je conteste la formule de co-existence des deux dispositifs c’est que le dispositif L351-1-4 n’est pas un dispositif de compensation de la pénibilité, mais de compensation d’une incapacité de travail AT ou MP d’au moins 20%, avec « repêchage » à 10% si l’IPP est liée à une exposition à un risque « pénible » plus de 17 ans. Donc effectivement ce cas particulier de retraite anticipée pour cause d’IPP va co-exister avec le CPPP, mais il en reste objectivement distinct (on a un dispositif de retarite anticipée « IPP » et un autre « pénbilité »).
    A suivre… Bye.

  3. Hello !
    J’ai retrouvé un justificatif de mon « interprétation » visant à dire qu’il n’y avait pas coexistence de deux dispositifs de retraite anticipée / pénibilité : c’est l’Article 15 de la la réforme des retraites L2014-40 qui prend la peine de préciser que l’intitulé « Compensation de la pénibilité » du chapitre II du titre IV de la loi précédente L2010-1330 devient « Compensation d’une incapacité permanente ». Je me disais aussi…
    Bye.

    • Non Henri, je ne suis pas d’accord avec toi
      Il y a bien 2 dispositifs qui coexistent ( malgré ce changement de terminologie…)
      D’une part le départ anticipé à la retraite au titre de compensation de la pénibilité, institué par la loi du 9 novembre 2010 et en vigueur depuis le 1er juillet 2011 : ce dispositif repose sur la notion d’incapacité permanente
      et d’autre part l’autre mécanisme créé par la loi du 20 janvier 2014, le compte personnel de prévention de la pénibilité.

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